Les familles d’accueil ont été sous la loupe de trois projets de recherches ces dernières années dans le cadre d’une vaste initiative de la Fondation Palatin intitulée «Enfants placés en famille d’accueil – nouvelle génération». Sur quels aspects les travaux se sont-ils penchés et qu’est-ce qui a guidé ce choix ?
Les trois projets de recherche ont exploré en profondeur les structures cantonales du placement en famille d’accueil, l’accompagnement du placement et la participation des enfants placés. Ces thématiques ont été choisies par la Fondation Palatin à la suite d’une étude préliminaire qui avait mis en évidence des lacunes dans ces domaines. L’objectif du programme « Enfants placés – prochaine génération » était ainsi de mieux appréhender les réalités concrètes du terrain, de produire des connaissances empiriques utiles à la pratique professionnelle et de contribuer à l’élaboration de politiques publiques adaptées aux besoins des enfants et de leurs familles.
Quels sont les principaux enseignements tirés de ces travaux ? Qu’est-ce qui fonctionne bien et qu’est-ce qui devrait être amélioré ?
Les résultats montrent les réalités complexes du placement en Suisse, marqué par un patchwork de systèmes de placement en famille d’accueil structurés de manière très diversifiée, ce qui génère une grande hétérogénéité dans les pratiques, les ressources et les représentations du placement. Je citerai, sans prétendre à l’exhaustivité, deux résultats intéressants relatifs à l’apport d’une approche multiperspective et à l’attention portée à l’ensemble du parcours de vie de l’enfant.
Le placement en famille d’accueil est une expérience vécue différemment selon les acteur·ices impliqué·es, notamment l’enfant placé·e, sa famille d’origine, sa famille d’accueil et les professionnel·les. Comme chaque perspective soulève des enjeux spécifiques, les résultats ont montré qu’une collaboration réussie repose sur l’élaboration d’une définition commune de la situation, fondée sur une compréhension mutuelle et le respect des différentes perspectives. Cette reconnaissance est essentielle pour accompagner la double appartenance des enfants à leur famille d’origine et à leur famille d’accueil, et elle nécessite le développement de relations de confiance durables entre tous les acteur·ices, tout en plaçant la voix de l’enfant au cœur du processus.
Le début et la fin d’un placement en famille d’accueil sont des transitions majeures pour l’enfant et ses proches qui nécessitent un travail de préparation et de suivi important. Cependant, d’autres transitions complexes peuvent survenir tout au long du parcours, notamment lors de changements scolaires, de soins psychiatriques, d’événements familiaux (ex: séparation, naissance), ou en cas de crise. Les résultats ont montré que le défi professionnel consiste à mieux comprendre ces transitions pour les soutenir efficacement, en reconnaissant leur diversité et leur impact sur la stabilité du placement. Plutôt que de viser uniquement la stabilité, il s’agit d’identifier les conditions d’un accompagnement réussi, capable de favoriser la continuité et le bien-être des enfants placé·es.
Quelles seraient les trois mesures concrètes à mettre en œuvre de manière prioritaire dans la pratique et les politiques publiques dans ce domaine ?
Les résultats des trois projets ont été rassemblés dans un livre de synthèse intitulé Herausforderungen der Pflegekinderhilfe: Partizipation, Begleitung, Akteure, Strukturen / Les défis du placement d’enfants en famille d’accueil : Participation, accompagnement, acteurs, structures (Wolf et al., 2025) dont le vernissage aura lieu prochainement. Nous y développons de nombreuses pistes pour le développement de la pratique professionnelle et de la recherche. Parmi elles, citons d’abord, la nécessité d’une certaine harmonisation des standards cantonaux afin de garantir une équité dans l’accompagnement et le soutien proposé pour tous les types de placements, en particulier ceux au sein de la parenté, tout en n’imposant pas un modèle unique d’organisation cantonal. La deuxième viserait à garantir des droits de participation aux enfants et aux jeunes dans les processus de décision qui les concernent et de promouvoir également leur participation dans leur vie quotidienne. Enfin, la troisième mesure concernerait les ressources allouées aux professionnel·les pour accomplir ces tâches exigeant du temps et de la collaboration, ainsi que le développement de formations leur offrant davantage d’outils adaptés à la gestion des tensions spécifiques au placement en famille d’accueil.